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Immortelle Marilyn

Nez à Nez

Flacon de Immortelle Marilyn - Nez à Nez
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Attraction éternelle

par Thomas Dominguès (Opium), le 3 août 2011

Créer un parfum intitulé du nom de l’un des plus grands mythes hollywoodien est déjà, en soi, une démarche culottée. Mais, quand il s’agit d’une star dont la planète, depuis des décennies, connaît le parfum, car elle lui a offert la plus grande campagne de communication gratuite qui soit, on peut se demander s’il ne s’agit pas d’irresponsabilité. Après avoir rencontré son auteur, on sait qu’il s’agit
surtout d’un trait d’humour à la fois potache, mais également plus profond qu’il n’y paraît.

Marilyn : l’éternelle, l’immortelle. C’est à elle que rend hommage la dernière sortie des parfums Nez à Nez. A cette femme troublante, détestée ou adulée, des années après qu’elle s’est révélée trop
mortelle. A cette femme qui déclarait ne rien porter la nuit pour dormir, à l’exception de deux gouttes du N°5. A quoi ressemble donc cette Immortelle Marilyn qui doit nous faire ressentir les deux aspects de cette personnalité attachante : la séductrice qui se prépare au jeu de séduction du monde qu’elle va conquérir au début de sa nuit /de sa vie ou la femme fragile qu’elle a pu être après une énième nuit d’amour encore avec le mauvais garçon et plus d’alcool et de médicaments que de raison à la fin de sa nuit / de sa vie ? C’est cette ambivalence - probablement un chouïa stéréotypée, mais, Marilyn n’est-elle pas le prototype de la blonde à stéréotypes / mauvais types ? - que Stéphane Humbert Lucas a tenté de mettre en flacon.

La création de Nez à Nez ne ressemble en rien à la meilleure des ventes des parfums de Chanel - et du monde - à ce jour. Et cela est bien heureux ! Au contraire, à la lecture des notes qui composent le
parfum, nous sommes très éloignés de l’univers de Coco Chanel. Certaines notes gourmandes sont la retranscription olfactive de la Marilyn délurée, alors que d’autres notes, plus profondes ou sales, sont
censées être à l’image de sa fragilité et de sa profondeur, cachées derrière la blonde écervelée qu’elle tentait de faire croire qu’elle était.
Le parfum évolue ainsi en deux temps : celui du boudoir, moment durant lequel la nuit est devant soi et pleine de promesses, durant lequel lipstick et décolleté vertigineux seront les armes de soumission et de maîtrise. Puis, le temps du retour chez soi, seule ou accompagnée, mais qui se termine toujours le regard un peu hagard dans des draps défaits après une nuit trop longue et chahutée.

Par respect pour le créateur de ce parfum, et parce que, surtout, les termes choisis par lui sont plus beaux, nous ne parlerons pas de notes de tête, cœur et fond, mais de "fulgurance", de "métamorphose" et de "quintessence".
Ainsi, la "fulgurance" se fait avec un accord boudoir gourmand mêlant une immortelle aérienne et translucide, fleurie, légère et plastifiée, à un accord de fruits rouges par la framboise, de noisette et d’ylang. Le rendu est extrêmement féminin et séduisant, même si ce sont surtout la framboise et la noisette qui se font remarquer. Ce rendu est également complexe voire confus. Une sorte de débordement dans le chaudron des matières est voulu, tel un maquillage nocturne réussi qui
impliquerait une surcharge des strates, mais donnant l’impression, par la maîtrise, d’avoir été effectué avec légèreté si la lumière est adéquate. Ces gourmandises en nombre, fort heureusement pas trop
sucrées, évoluent très lentement pour une "métamorphose" dans de légères notes épicées par la noix de muscade et poudrées par l’iris (ah, ce moment où l’on sent la poudre qui a été déposée sur un visage car la nuit devient plus longue et mouvementée que prévu !). Le maquillage et la robe sont en place, mais commencent à être maltraités. Ils seront les outils permettant à la séduction de faire succomber l’autre, au moment de la "quintessence", dans un moment tracé de cuir doux (plutôt daim), de muscs, d’ambroxan et d’un absolu d’immortelle qui a tout oublié de la fleur et de la légèreté pour conserver un aspect un peu douceâtre et sale de sueur et de corps échauffés sur l’asphalte, presque brûlés par la nuit écoulée (par les notes miellés de tabac et de curry propres à l’immortelle).
Après les promesses d’une nuit / vie de séduction, n’en restent que quelques traces, un peu souillées,
de corps entrelacés. A ce moment précis, celui de la fin de cette nuit / vie, la fragrance fait furieusement penser à un autre parfum que l’on aime ou déteste, mais qui ne laisse pas indifférent,
Sables d’Annick Goutal, dont la création est due à Annick Goutal, Isabelle Doyen et Henri Sorsana. Ce dernier, un parfumeur grassois, a également été le mentor de Stéphane Humbert Lucas lors de la
création de Hiroshima Mon Amour et de cette Immortelle Marilyn pas si éloignée que cela de la création de 1985. Comme son illustre aïeul, la ténacité de ce parfum et son sillage sont à toute épreuve (la faute / la chance à l’ambroxan et aux muscs, ainsi qu’à l’immortelle, qui laissent leurs traces des heures après la vaporisation !).

Etymologiquement, la fleur Immortelle provient de Hélios qui signifie soleil et Khrusos, or. L’immortelle, cette fleur si ambivalente, est l’image même, donc, de la star à qui elle octroie l’immortalité par le soleil, l’or
et ses caractéristiques odoriférantes. Donc, une immortalité dans la dualité : entre le jour et la nuit, l’or et la souillure ; entre le propre apprêté d’une vie mondaine et le sale d’un corps transpirant une
nuit après l’amour ; entre le gourmand d’une fille frivole, et la chaleur humaine d’une femme seule dans sa chambre d’hôtel. Dualité psychologique du personnage qui se révèle par la fleur à laquelle on
attribue le pouvoir, dès lors qu’on la respire, de "ramener à la surface" des conflits intérieurs anciens...
Certain(e)s ne trouveront probablement ce parfum pas assez ambigu, pas assez sali et trop féminin, ou plus précisément "girly". D’autres le trouveront compliqué, confus et brouillon plutôt que complexe,
touffus et réussi... A l’image de son icône, souvent incomprise et rejetée. Toutefois, il s’agit, après les dix premiers parfums qui avaient été édités presque en tir groupé il y a des années, probablement de l’une des créations les plus réussies, les plus abouties de la marque Nez à Nez. Pas assez extrême dans la musique jouée entre le premier et le second temps, entre les promesses et la réalité peut-
être. Pourtant, à découvrir, à aimer, à haïr... comme Marilyn, peut-être immortelle...

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Rosier Ardent
critique

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Qui s’y frotte s’y brûle

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Mado33

par Mado33, le 26 février 2012 à 23:16

On célèbre les 50 ans de sa disparition d’où ce parfum. Personnellement, je n’ai pas du tout envie de le découvrir. Marilyn aurait mérité un parfum de son vivant... Et puisqu’elle portait le vrai numéro 5, je ne vois pas comment lui rendre hommage via un parfum ?? A mon avis c’est impossible.
La dualité évoquée fait clairement référence à la maladie psychique dont souffrait l’actrice, à savoir ce qu’on appelle aujourd’hui un trouble bipolaire ( anciennement PMD donc ).
La critique est vraiment magnifique, parfaite même, cela dit aucune envie de sentir ce parfum. Peut être que ça viendra, mais pour l’heure non.

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Patrice

par Patrice, le 20 janvier 2012 à 22:17

Tom, j’espère que tu m’en voudras pas, mais je ne sens absolument rien de toute ta description à propos des notes. Pour moi il est linéaire d’un bout à l’autre !!!
Et très franchement, l’immortelle n’y est pas fameuse, pour ne pas dire que je ne la perçois presque pas.
L’idée était belle, mais ne semble pas avoir aboutit : le côté sombre de l’Helichrysum n’est, pour moi, pas assez mis en avant pour créer une dualité "sage/gourmand/maquillage" VS "sombre/sale/mystérieuse", une cassure dans le parfum !
Quelque chose me turlupine encore : lorsque je l’ai senti, le premier mot qui m’est venu à l’esprit est "Womanity" !
Franchement, je ne sais pas pourquoi ce parfum me ramène à chaque fois au dernier né de Mugler !!! Et je vous jure qu’il y a quelque chose !
Enfin, même si le parfum m’a déçu par rapport à ce dont tu nous parlais, je vais tout de même lui mettre 2 étoiles, car il a un petit quelque chose d’agréable, de pas commun, et est pour moi l’un des Nez à Nez les plus réussit ! (avec Marron Chic !)

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Opium

par Opium, le 20 octobre 2011 à 11:14

Bonjour à toutes et à tous...

 

Je profite de quelques minutes pour vous répondre bien trop tardivement, mais, mieux vaut tard que jamais (comme le dit le proverbe bien déculpabilisant)... La période des vacances est indéniablement celle où l’on décroche un peu trop du quotidien. Je tente petit à petit de rattraper un peu le retard accumulé ici en quelques semaines.

 

Vivi (honneur aux dames)...
Nous avions discuté, il y a des semaines, de ce à quoi pouvait bien renvoyer le choix de mon terme "plastifié" pour décrire l’une des étapes d’évolution de cette Immortelle Marilyn. Je t’avais expliqué que c’était cette espèce de surface enveloppante cosmétique et gourmande, telle un film enveloppant, à la fois sucré et mobile, tout en étant glossy - cosmétique en même temps que poudré - cosmétique.
Un effet trousse à maquillage, mais plus lipstick que fard à joues en somme.
Tu cites quelque chose qui m’interpelle car, après coup, cela éveille de très très vieux souvenirs (de l’époque où ma petite soeur était un bébé) : l’odeur des poupées Corolle ! Il va me falloir aller faire un tour dans les boutiques de jouets près des Grands Magasins parisiens !

 

Vivi, Xxerus, Jean-David et Dreamparfum, je vous remercie pour vos compliments, toujours un régal à lire et savourer.
Au vu du nombre de sorties qui ont lieu, on a parfois du mal à suivre, même sur les blogs et entre passionné(e)s, toutes les nouveautés qui arrivent sur le marché. Aucune autre critique pour le moment n’avait été réalisée sur ce parfum. Je me sentais un peu seul et me demandais si l’accueil, si chaleureux de son créateur, n’avait pas sensiblement influencé mon nez de manière trop positive.
Je vous invite à lire la critique consacrée à Immortelle Marilyn rédigée par Sophie sur son site My Blue Hour. Elle y apporte un regard qui complète mes impressions et souvenirs d’il y a quelques semaines (mois ?). Son analyse très fine et sensible met bien en relief ce parfum tout en ambivalence entre le début de l’histoire qu’il nous raconte, et sa fin (de la "fulgurance" à la "quintessence" en passant par la "métamorphose" comme aurait préféré son créateur).

 

Je vous souhaite une très agréable journée,
Opium

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Vivi Snow

par Vivi Snow, le 4 août 2011 à 10:47

Bonjour Opium,
J’aime beaucoup ces mots : "fulgurance, métamorphose et quintessence" pour parler des notes d’un parfum. Je les adopte de suite ! Tout comme ton "nuage", Opium, quand tu portes un parfum... Ces mots n’ont pas besoin de définition, on comprend immédiatement ce qu’ils signifient.
Une immortelle plastifiée, tiens donc ! De quel plastique s’agit-il, comme le fond de Nuit de Cellophane, comme les poupées "Corolle", une trousse de toilette,... ou parles-tu d’autre effluve plastifié ??? Il faut que tu m’expliques parce que ça me parait incongru une immortelle qui sent le plastique.
Mais franchement, pour moi qui aime Sables, elle donne envie cette immortelle-là.
Je suis curieuse de sentir ce que ça donne mêlée à de la framnboise, de la noisette, des épices, de l’iris et du daim...
Contente de te lire pour un autre parfum après Antaeus et BRAVO,
Bises à Perles ;-)

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Améthyste

par Améthyste, le 3 août 2011 à 21:21

Bravo pour ta superbe critique bien détaillée Opium. ça me fait également envie !

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xxerus

par xxerus, le 3 août 2011 à 14:21

Bravo pour cette critique, Opium : elle me donne grande envie d’aller découvrir cette fragrance !

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par Jean-David, le 3 août 2011 à 20:08

Et moi c’est pareil !

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