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Cardinal

Heeley

Flacon de Cardinal - Heeley
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Encens dansant

par Samuel Douillet, le 15 janvier 2020

Un encens solinote moins solitaire qu’il n’y paraît.

Designer de formation, James Heeley est un parfumeur anglais vivant en France. Sa marque est caractérisée par une certaine épure et un raffinement tout britannique.
Aux côtés d’une gamme à la cohérence teintée d’élégance, presque de retenue (Menthe fraîche ou Oranges and Lemons Say The Bells of St. Clement’s), on trouve aussi des signatures plus affirmées (l’audacieux Esprit du tigre pour n’en citer qu’un), puis depuis quelques années une collection supplémentaire constituée d’extraits de parfums, à la touche nettement plus levantine.
Cardinal, puisque c’est lui que nous sacralisons ici, met en scène une matière chère aux religions - j’ai nommé l’encens. De cette résine originaire d’Oman, aussi appelée oliban, on retrouve la trace dans d’antiques rites religieux : chez les égyptiens avec le kyphi, les hébreux avec la formule de l’offrande divine relatée dans la Thora (en hébreu « levona », vocable proche de « oliban »). Elle est selon la Bible apportée en offrande par les Rois Mages à Jésus qui vient de naître, et parfume encore abondamment les églises. Enfin, dans l’Islam (sous le nom arabe « al-loubâne »), le prophète désigne ses bienfaits pour purifier l’air et même en cas de mémoire défaillante !
Par conséquent, en parfumerie - occidentale qui plus est - l’encens est quasi-systématiquement devenu un vecteur de spiritualité ou d’ambiance ecclésiale, plongeant non seulement celui qui s’en approche dans un décor de nefs, d’autels, de bancs en bois et de cierges, mais aussi dans une aura propice à toute élévation de l’esprit, quelle que soit la culture.
Le départ est donné par la baie rose, à l’odeur montante et épicée qui atténue l’aspect froid et citronné de notre cher oliban qui se dévoile. Un accord aldéhydé évoquant du lin blanc se déploie alors dans un souffle caressant, drapant l’ensemble d’une propreté presque immaculée. On évite ainsi l’austérité que peuvent procurer Reliques d’amour d’Oriza Legrand avec son lys et son encens minéral, ou Chembur de Byredo et son gingembre fortement hespéridé.
Bien vite, Cardinal poursuit son réchauffement olfactif avec un compagnon idéal : le labdanum, qui apporte sa dimension ambrée enveloppante. La danse se poursuit par-delà un fond boisé mêlant patchouli et vétiver, qui affiche un peu de son ADN d’outre-manche, arborant un savoir-vivre impeccable.
Si beaucoup de beaux encens existent dans le paysage de la parfumerie actuelle (Bois d’encens chez Armani vaut le détour, tout comme Reliques d’amour déjà cité, ou Avignon chez Comme des garçons), Cardinal est lui un tout petit peu moins figuratif en proposant d’enrober l’encens dans une aura de sérénité blanche et vaporeuse, dont l’aspect propret incarne pour moi l’ultime parfum "de chemise blanche", subjectivement bien plus qu’une cologne ne saurait le faire.
Une austérité qui gagne en confort et en simplicité par un malicieux tour de passe-passe à l’anglaise, allégeant un peu cette rigueur religieuse.

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Aberystwyth

par Aberystwyth, le 4 octobre 2020 à 15:59

Très bel encens !
De manière intéressante, je perçois en ouverture une facette tout à fait vineuse à ce Cardinal. Clin d’œil provocateur à un passé pas toujours sobre des cardinaux ? Ou à leur tenue pourpre ? Peut-être en réalité n’est-ce que mon nez qui me joue des tours, et me fait percevoir l’assemblage sec et quelque peu râpeux de la tête comme une vapeur alcoolisée.
Peu importe, j’aime ce parfum, et j’aime le porter. Que peut-on demander de plus ?

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euskalpyth

par euskalpyth, le 22 janvier 2020 à 14:34

Un bien bel article pour un bien beau parfum !

Cardinal reste mon encens favori, même s’il n’est pas forcément le plus representatif ni le plus réaliste : en termes de réalisme, la Liturgie des heures de Jovoy reste pour moi ce qui se fait de plus proche de l’encens fumigatoire des offices de l’église arménienne, que j’ai senti toute mon enfance, mais j’ai un peu de mal à le porter tellement il est présent, même s’il est sublime.

Cardinal est ce que j’appellerais un "encens grand débutant" : il est frais (je me demande s’il n’y a pas de la limette cachée quelque part, car on a vraiment un côté "coca-cola" par moments), il n’est pas intimidant (contrairement au Bois d’encens d’Armani, fort beau mais très hiératique et imposant) ni envahissant, il est donc plutôt facile d’accès, même (et surtout ?) si on n’est pas familiarisé avec les encens, et on peut le porter en toutes circonstances (le côté "chemise blanche" dont parle Samuel).

Il n’a pas un sillage nucléaire (ça n’est d’ailleurs pas ce qu’on lui demande) mais sa tenue est plutôt bonne (au bout de plusieurs heures, il se rappelle parfois à vous au hasard d’un mouvement, preuve qu’il est encore là et bien là), et il reste, ce qui ne gâche rien, à un prix très abordable.

Il a été visiblement été reformulé (et quand je dis "visiblement", c’est parce que c’est visible : comme pour Encre noire de Lalique, ils ne peuvent pas nier, car le jus a changé de couleur...) mais je ne distingue pas de différence au nez avec la version antérieure, ce qui est un bon point, alors si vous ne le connaissez pas, allez le découvrir, il vaut vraiment le détour !

(et profitez-en pour tester aussi Verveine d’Eugène, qui est magnifique)

Après, la liste des jolis encens est longue, pour les fans et/ou les curieux : outre la Liturgie des Heures qui reste pour moi incontournable et Bois d’encens que beaucoup considèrent comme le maître-étalon encens, il y a aussi l’Ether de Iunx et Encens Chembur de Byredo (déjà cités avec raison : un bonheur d’encens doux mêlé de santal pour le premier, et un encens muscade pour le second), toute la série Incense chez CDG (Avignon, étonnament proche de Cardinal, Zagorsk, plus fleuri, Tokyo, boisé à souhait, Jaisalmer, doucement parfumé aux épices indiennes, et Ouarzazate que je connais moins), Passage d’enfer de l’Artisan parfumeur ancienne version (avant la reformulation qui doit correspondre à l’abandon des flacons transparents et qui l’a malheureusement complètement lessivé) et sûrement plein d’autres auxquels je ne pense pas...

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par Farnesiano, le 22 janvier 2020 à 20:57

Merci, Euskalpyth et Beer Luc, pour vos deux longues listes, qui me donnent ce soir une furieuse envie d’explorer plus avant la troublante résine. Je songe aussi tout à coup au noble et bel Akkad de Lubin, parfum ambré, baumé, vanillé, assez monolithique mais franchement addictif.

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par Iridescente, le 23 janvier 2020 à 17:24

Grimoire, bien sûr ! Quoique je sois fort colère de constater une nouvelle hausse des prix chez l’ami Anatole, je chéris cet élémi contemplatif et sensuel à la fois.
Et puis, chez Oriza L. Legrand, Rêve d’Ossian et Relique d’Amour. Le premier est plus oriental et boisé, le second plus minéral, un lys sur la mousse.
Et puis, bon, il y avait aussi Elixir de Penhaligon’s mais je crois bien qu’il ne se fait plus.

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par ghost7sam, le 29 janvier 2020 à 23:40

Bonsoir Iridescente,

Les 2 opus d’Oriza que vous citez sont effectivement très beaux.
Ma préférence va toutefois à Relique d’Amour, tellement minéral et violemment floral, plus extrême que Rêve d’Ossian, que j’aime beaucoup aussi mais qui est selon moi très adouci avec sa grosse vanille.

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par Iridescente, le 31 janvier 2020 à 22:23

Bonsoir, ô fantomatique aromaphile ! Vous avez sans doute raison de souligner l’aspect oriental de Rêve d’Ossian, mais j’ai une chance (?) en la matière qui est que la plus grosse des vanilles sur moi disparaît en un rien de temps, ou elle fait de la figuration timide derrière les baumes. Mais oui, Ossian est un encens d’église chaud, comme Messe de Minuit d’Etro (qui n’a point de vanille à son actif, si ma mémoire est bonne), quand Relique d’Amour est froid et un peu dangereux dans sa mélancolie contemplative. Le premier est un hommage parfait à l’ossianisme, romantique, fiévreux, emporté, en train de dresser des plans pour une église néo-gothique flambant neuve ; le second est une cathédrale abandonnée lentement mais sûrement recouverte par la végétation.

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par ghost7sam, le 29 janvier 2020 à 23:38

Hello cher Euskalpyth, merci pour ton commentaire et tes gentils mots ;-) !

J’ai beau chercher, je ne vois pas cette facette limette à Cardinal ; c’est lors de la note de tête ?
Pour moi, le parfum le plus coca-cola du marché est Kenzo Power avec cette ouverture fraîche et épicée. Patrice m’avait un jour expliqué que pour faire un accord coca-cola, il faut assembler limette et cannelle.

En tout cas, je savais que tu appréciais Cardinal :-)

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Chanel de Lanvin

par Chanel de Lanvin, le 15 janvier 2020 à 19:08

On peut également citer Lavs de Unum qui est très abouti et le nucléaire Rien Intense de Etat Libre d’Orange,des encens très bien conçus,que j’adore porter en saison hivernale,ainsi que Bois d’Encens de Armani, Passage d’Enfer de l’artisan Parfumeur et Messe de Minuit de Etro.
Ce dernier s’enveloppe de citron sur une couche de miel,un parfum de caractère.
Le Requiem de Mozart n’étant pas loin,ce Cardinal qui m’est inconnu me servira peut-être de guide dans la sphère olfactive dédiée à l’encens.

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