Auparfum

Le parfum comme oeuvre de l’esprit ? Pas pour 2014 !

par Juliette Faliu, le 5 janvier 2014

La nouvelle arrivée ce vendredi 3 janvier 2014, est tombée comme un cheveu sur la soupe du nouvel an tout frais des perfumistas.

La Cour de Cassation saisie pour une affaire de plagiat opposant la société Lancôme à un vendeur de parfums ambulant, a confirmé le premier jugement de la Cour d’Appel de Nancy, en stipulant qu’un parfum "n’est pas une œuvre de l’esprit susceptible d’être protégée par le droit d’auteur".

Le vendeur proposait en effet sur les marchés une fragrance intitulée La Valeur, semblant correspondre de façon troublante au fameux Trésor de la maison Lancôme. Tout au plus ledit vendeur pourrait-il être poursuivi en dommages et intérêts pour concurrence déloyale.

Cette nouvelle décision de justice, qui s’est d’ailleurs appuyée sur la jurisprudence existante, relance de débat de la protection des œuvres olfactives qui ne sont donc toujours pas considérées comme des œuvres de l’esprit à part entière. Cette impossibilité pour le parfum d’être reconnu comme une œuvre tiendrait au fait que, selon la Cour, la forme "sensible" d’une fragrance n’est pas suffisamment "identifiable et précise" pour permettre sa communication et sa compréhension de façon uniforme par le public. En d’autres termes, le parfum, c’est trop subjectif.

La question de la protection des parfums est un sujet très épineux, emportant dans son giron des problématiques telles que celles des reformulations, de la paternité d’un parfum (la marque, le parfumeur, le parfumeur et les évaluateurs/rices ?), ou du plagiat.

Mais ces créations ne méritent-elles pas une forme de reconnaissance ? Y a-t-il, auprès du grand public, une méconnaissance si grande du métier de parfumeur ?

Cette décision vient relancer le débat : est-il légitime qu’un parfum soit protégé par le droit d’auteur ? Et plus largement : la parfumerie sera-t-elle un jour reconnu comme un Art ?

Thème

Lancôme
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lrisfleur

par lrisfleur, le 5 janvier 2014 à 13:48

Bonjour,

La jurisprudence de la Cour de Cassation peut sembler assez fumeuse eu égard à tout ce qui est par ailleurs protégé par le droit d’auteur : le logiciel depuis 1991, le panier à salades, le boulon, certains sons...
En principe, la protection par le droit d’auteur, d’après le critère mis en avant par le code de la propriété intellectuelle, est l’originalité, à savoir l’expression de la personnalité de l’auteur dans l’oeuvre à protéger. Or, dans le cas du parfum, il semble bien que ce critère soit rempli : chaque fragrance a sa propre originalité.
Le principal obstacle serait donc sa forme, qui ne serait pas assez identifiable et précise : à l’instar d’un morceau de musique, il faudrait donc une façon d’exprimer la formule d’un parfum qui répondrait à ces exigences. Je ne m’y connais pas à assez pour en être sûre mais j’imagine que la formule des parfums doit tout de même avoir un certain degré de précision, sinon comment les parfums pourraient-ils être reproduits et perpétués dans le temps ?
Quoi qu’il en soit, cette prise de position reste contestable et il me semble en tout cas très légitime que le parfum soit protégé par le droit d’auteur : cela aurait notamment l’avantage d’empêcher les reformulations catastrophiques. En effet, au nom du droit moral de l’auteur, tout changement dénaturant l’oeuvre recueillerait le consentement de l’auteur (donc du parfumeur) pour avoir lieu : cela nous préserverait des nouvelles versions douteuses du type Opium ou Magie Noire...

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par benoit, le 5 janvier 2014 à 18:24

C’est un peu plus compliqué que ça. Le logiciel n’est pas protégé en soit par le droit d’auteur. Seul le code source l’est. C’est à dire qu’on peut très bien faire un logiciel tout à fait identique, mais sans avoir repris le même code (mais rien d’empêche de faire un code qui fait exactement la même chose).

Les recettes de cuisine ne sont pas protégées par le droit d’auteur non plus.

Pour ma part, je ne suis pas du tout pour les protections à tout va. Seul le droit des marques me semble nécessaire pour savoir précisément qu’on achète bien le produit d’une entreprise identifiée (et pas une contrefaçon). Mais que ferait-on si certaines entreprises déposaient des parfums basiques tels que la rose ou la vanille ? C’est comme si on déposait des couleurs (contrairement à la croyance, le bleu Klein n’est pas protégé, seul son mode de fixation l’est).

Il y bien évidemment des parfums qui sont des créations, mais les contours de ce qu’est une création de ce qui ne l’est pas est difficile à définir, à moins de protéger les formules précises.

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par hugo, le 21 janvier 2014 à 10:06

> Le logiciel n’est pas protégé en soit [sic] par le droit d’auteur. Seul le code source l’est.

C’est faux, le logiciel est protégé en soi comme œuvre, pas seulement le code source. Il y a même un régime spécial du droit d’auteur pour le logiciel qui prend en compte tout cet aspect (voir les problèmes sur l’exception de décompilation, les discussions sur ce qui constitue une œuvre dérivée, etc.)

D’ailleurs, pour s’en rendre compte, il suffit de se demander : puis-je partager un logiciel Microsoft ? Pourtant, vous n’avez pas le code source, mais juste le code compilé ; si on vous suit, on pourrait partager légalement les logiciels Microsoft. Or, ce n’est pas le cas (pas seulement parce que c’est interdit dans le contrat, c’est aussi interdit par la loi).

***

> C’est à dire qu’on peut très bien faire un logiciel tout à fait identique, mais sans avoir repris le même code

C’est une question tout à fait différente, qui se pose, même quand on n’a pas accès au code source. Par exemple, l’arrêt SAS c. WPL de la CJUE qui tranche cette question, concerne bien un logiciel propriétaire, et non seulement la question du code source ;-) En réalité la question posée n’était pas « peut-on très bien faire un logiciel tout à fait identique » mais se rapprochait plutôt de « peut-on faire un logiciel aux fonctionnalités identiques ? ».

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