Auparfum

Episode 4 - Un mouchoir et une voilette trouvés après la pluie

17 juillet 2014, 05:54, par Jicky

Salut TheLittleBox !

Votre interrogation est très intéressante. Je vais d’abord rejoindre Opium : les originaux étaient construits sur une durée plus importante qu’aujourd’hui, impliquant un déploiement que l’on considérerait aujourd’hui comme plus lent. Néanmoins, je pense être plus radical dans l’appréhension de la fraîcheur : si les originaux sont plus texturés, je les considère aussi plus "frais" que ce que le marché propose aujourd’hui !

En effet, la richesse et le traitement des naturels comme des synthétiques plus hesperidés ou verts (voire certains floraux frais) permettent des envolées beaucoup plus scintillantes et indépendantes que les actuels, moins consistants en brillance et surtout à l’heure où planent les ombres des fonds des parfums dès les dix premières minutes passées ( c’est saisissant avec l’Eau de Magnolia de Frédéric Malle : si la tête hespéridée est d’une singulière virtuosité, presque aussi fraîche et facettée que d’anciennes eaux, très vite vient planer l’ombre des bois ambrés les plus effrayants de la Terre, sans mesure et sans autre intérêt que de faire durer une pseudo fraîcheur, alors dépecée de toute naturalité et de toute beauté).

Du coup, quand on sent un Pao Rosa, un Sous Le Vent ou une Fleur de Feu chez Guerlain (que nous traiterons dans la saga), on a trois fraîcheurs complètement différentes (une hespéridée, une verte et une aldéhydée), et beaucoup plus "fines et légères" que ce que l’on pourrait croire. Quant à ce que pourrait penser le "grand public", je me suis amusé à faire tourner les touches dans mon amphi d’étudiants de chimie (qui ne se rendaient pas compte un seul instant de l’importance de ce qu’ils sentaient, j’ai pensé aux lecteurs d’auparfum qui ne peuvent pas sentir ces bijoux à ce moment là en me disant "dire qu’il y en a qui seraient prêts à porter le dernier flanker Cacharel pendant une semaine pour sentir cela"). Bien évidemment, beaucoup ont dit "ça sent fort" et "ça sent la vieille" (forcément, ça ne sent ni le sucre, ni le déo, ni le shampooing). Mais quand on cherche à creuser, j’ai souvent "c’est épicé", "ça pique le nez" et ils remarquent vraiment la capacité que certains ont à se diffuser dans l’espace. Intéressant, ils ne remarquent pas l’animalité et surtout, quand ils comparent à l’aveugle une repesée et une version actuelle (testé avec Shalimar et Après L’Ondée), ils préfèrent systématiquement... La repesée !

Quant à l’écriture Guerlain, j’avoue être plutôt un "Guerlinade-sceptique". Il y a évidemment certains gimmicks, certains clichés que l’on entrevoit chez Guerlain, mais ils sont déconstruits plusieurs fois par décennies. Je crois plutôt qu’une écriture Guerlain dépend de son parfumeur, qu’en ce sens un Guerlain de Jacques est différent d’un Guerlain de Jean-Paul mais aussi d’un Guerlain de Mathilde, Maurice ou Thierry. En revanche, j’ai tendance à croire qu’il y a une forme d’écriture Guerlain non-codifiée que chaque parfumeur interprète. Je ne suis pas clair, ce que je dis c’est que je ne pense pas qu’il y ait une Guerlinade d’écrire comme on peut le lire (les fameux "six ingrédients de la Guerlinade") mais plutôt que les parfumeurs ont une vision de l’écriture Guerlain, et que leur composition reflète cette appréhension plus abstraite du parfum tout en y insufflant des thématiques personnelles (c’est criant chez Roucel qui traite l’opulence et la générosité et y déploie une texture très lumineuse toute personnelle, L’Instant et Insolence étant des parfums très Guerlain mais différents des canons un peu trop restrictifs de ce qu’Opium nomme "les sous Shalimar").

Je ne suis pas sûr d’être parfaitement clair, n’hésitez pas si vous voulez que je précise ma pensée sur certains points :)

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